Pourquoi l'à-valoir est-il indispensable?

Je rebondis sur le sujet du droit de préférence pour développer ce thème de l'à-valoir. Il a déjà été évoqué à de nombreuses reprises, mais une piqure de rappel ne fait jamais de mal.
Voici un cas de figure réel puisqu'il me concerne. Nous sommes en avril 2014. Je viens de signer un contrat pour un roman qui paraitra vraisemblablement en mars 2015.
De mars 2015 à décembre 2015, mon éditeur fera les comptes du nombre d'exemplaires vendus durant cette période.
En mai 2016, il m'enverra mon relevé et s'il ne m'avait pas payé d'à-valoir à la signature du contrat, je serais alors rémunéré pour le nombre exact d'exemplaires vendus (sachant que la 1ère année d'exploitation, les éditeurs retiennent 20% du stock sorti car les libraires ont la possibilité de leur renvoyer les invendus). Donc en 2016, à raison d'environ 20 centimes par livre vendu, j'aurais touché quelques (dizaines, centaines, milliers, millions) euros.
Et idem en 2017.
Mais comme j'ai la chance de signer chez un éditeur qui pratique l'à-valoir, je toucherai dès le mois prochain une avance correspondant à plusieurs milliers d'exemplaires vendus. En mai 2016, mon éditeur retranchera les ventes réelles de mon à-valoir. Si les ventes dépassent cet à-valoir, il me rémunèrera en conséquence, sinon il ne me versera pas de droits cette année-là.
Cet à-valoir, je ne le vole pas: cette histoire publiée, il m'a fallu des semaines pour l'écrire. Et ce sera pareil pour l'illustratrice, puisqu'il s'agit d'un roman illustré.

D'ailleurs, comme je l'avais lu quelque part (je ne sais plus si c'est sur FB ou ici), pas mal de maisons d'édition disent "on débute, on est une petite maison, on ne peut pas payer d'à-valoir". ok. Mais pensez-vous qu'ils disent la même chose à l'imprimeur, au maquettiste, etc ? Pourquoi l'auteur et l'illustrateur seraient-ils les seuls à travailler gratuitement jusqu'à avoir vendu assez de livres ?

A savoir : votre contrat doit indiquer le tirage minimum de l'ouvrage dans le contrat, sauf s'il vous a versé un à-valoir (article L132-10 du Code de la propriété intellectuelle: Le contrat d'édition doit indiquer le nombre minimum d'exemplaires constituant le premier tirage. Toutefois, cette obligation ne s'applique pas aux contrats prévoyant un minimum de droits d'auteur garantis par l'éditeur.)

Merci pour les infos.
Pour du numérique, comme il n'y a pas de "tirage", on se réfère à quoi ?

J'ai envie de dire: "à rien". L'usage du numérique n'est pas encore très développé en France. Et quand je parle d'à-valoir, c'est pour des tirages papier parce que pour les ouvrages dématérialisés, je n'ai aucune expérience en la matière.

Un an plus tard, ce sujet est toujours d'actualité. Voici pourquoi.
L'année dernière, un éditeur me contacte et me propose d'écrire une histoire pour un ouvrage collectif. Les conditions sont correctes, j'accepte. Le contrat est signé, l'à-valoir versé, je passe à d'autres projets.
Comme depuis, je n'avais plus aucune nouvelle et que l'ouvrage en question devait paraitre le mois prochain, j'envoie un mail.
Entre temps, l'éditrice avec qui j'ai signé a changé, le livre collectif contiendra moitié moins d'histoires et la mienne fait partie de celles qui ont sauté.
Bien sûr, c'est dommage pour moi puisque mon récit ne sera pas publié. Mais comme ce n'est pas de mon fait, je conserve l'à-valoir et dispose de mon histoire. Je n'ai donc pas travaillé pour rien.

Je remonte ce sujet.

Evidemment je suis à 100 % d'accord avec ça... mais...

J'ai un manuscrit qui a été retenu chez une grande ME (bon c'est pas l'école des loisirs non plus...)

sauf que, pas d'à-valoir...

je pensais que seules les petites maisons n'en versaient pas (pour des raisons que je peux comprendre) mais là, c'est pas une petite maison...

D'ailleurs je sais que même Gallimard (en tout cas en adulte) n'en verse pas...

Alors dans ce cas-là que faites vous ? Les envoyer péter ?

Comme c'est une grosse maison d'édition, voir si tu peux négocier. Sinon au moins les interroger  sur les raisons qui les poussent à ne pas verser d'à- valoir.
Vu toutes les pointures qui ont publié chez cet éditeur, c'est qu'il est sérieux, à priori.

Tu ne peux pas dire que t'es 100 % d'accord avec ça si tu signes ce contrat. L'à-valoir est une nécessité. L'éditeur a du sentir la possibilité... S'il est intéressé par ton projet il le prendra avec à-valoir.

Je suis d'accord avec ce que tu ecris Toujoursinvit, MAIS  il y a peu d'editeurs qui proposent des à valoirs. D'ailleurs je serais curieuse de connaitre le % sur tous les editeurs jeunesse...
C'est une question importante .
J'ai déjà refusé 2 fois des contrats qui ne me paraissaient pas assez "serieux", sans à valoir bien-sur, l'un d'entre etait meme "à la demande".
Mais depuis je n'ai pas trouvé d'autres editeurs ... alors, ai-je eu raison ?

Si les conditions ne te satisfaisaient pas, alors tu as eu raison. Il n'y a rien de plus décevant que d'avoir un livre publié mais mal distribué ou payé au lance-pierre.
Si personne ne peut lire ton livre, alors quel intérêt?

"mal distribué " : La plupart des petits editeurs n'ont pas de distributeurs. Les seules ventes sont les salons et Internet.
Mais globalement je ne le regrette, sauf de temps en temps.

Entièrement d'accord avec toi sur le principe.

Par contre la réalité fait que non je n'ai actuellement aucun éditeur proposant d'à valoir mais :
j'en vis même si je complète avec le print puisque je suis graphiste, je travaille, je vends des livres donc rencontre mes lecteurs et du coup donne le goût de lire, j'ai des contrats qui découlent directement ou par ricochet de ces livres, j'aime à croire que des maisons d'édition peuvent grandir et avancer pour sortir d'autres livres avec j'espère un jour des à valoir... 

... et pour moi je pense que certes c'est insoutenable, injuste, énervant, écrasant et j'en passe que les auteurs et les illustrateurs soient ignorés comme ça ... mais que la chaîne du livre doit se réinventer ! 
exemple : les diffuseurs ne font quasiement jamais le travail et les éditeurs payent des fortunes pour rien ... seuls quelques titres prennent une place imposée aux libraires qui disent adieux à la bibliodiversité etc

Donc oui dans l'idéal je continuerai de rechercher des éditeurs qui acceptent et proposent un à valoir ...
et en attendant je les soutiens en relayant leurs livres (ça aussi ça serait bien qu'on soit plus nombreux à le faire car un mail ou un post sur un réseau social une fois par mois au minimum ne nous coûte rien et peut faire vivre nos livres et ces maison d'édition quasiment militantes) et en les offrant quand je le peux ... 
mais en attendant je veux faire un métier, vivre, manger, rénover ma maison, ...
et
par dessous tout refuser qu'un talent ou une histoire reste dans un tiroir alors que son message pourrait aider un enfant ou un adulte à rendre ce mon meilleur.
On a un rôle à jouer... 

Car je suis pour le respect des droits d'auteurs ... mais une chose est sûre si c'est comme le fait de vouloir faire payer les lectures ou de faire payer les auteurs allant en salons du livres ... c'est bien et idéal sur le papier mais dans la vraie vie ce sont des milliers d'associations ou petites structures littéraires qui ne pourront plus exercer, des auteurs et illustrateurs qui ne pourront plus vendre en salons, des lecteurs qui auront encore moins de bibliodiversité, ... et plein plein d'éditeurs (car ils sont en fait hyper nombreux !) vont tout simplement fermés alors que même sans à valoir ils font vivre des milliers de familles !

Donc dans l'idéal oui et je tâche d'y participer en militant pour le droit des auteurs
(même si pour le moment je n'en ai pas trouvé qui m'accueille dans leur maison d'édition) ... mais je ne veux pas qu'à force de tout "encadrer" réglementer on ferme la chaîne du livre. 

Pour ma part sans ces éditeurs, je n'aurai pu sortir Faribole et Mistigri, un livre sur de bien belles valeurs, qui a un succès fou auprès des lecteurs que je rencontre et qui a reçu le 1er prix jeunesse d'Allevard.

bon c'était la minute cloé papote et devient bavarde vu la longueur de mon texte ^-^ hihihi

Ahh un monde si génial et normal si on était payé dans les temps et à notre juste travail !
Grâce à toi et à ton post, je m'en vais rêver. 

à bientôt.

Ah Cloé !

cheyenne a écrit:Ah Cloé !

Oui quoi ? 

Tu as toujours des raisonnements remplis de belle humanité !

cheyenne a écrit:Tu as toujours des raisonnements remplis de belle humanité !

Ah ? 
Ah peut-être ^-^ hihihi

Ce n'est qu'un avis et puis il n'est pas parfait mais je trouve que dans ce monde injuste et imparfait il a le mérite de faire avancer les choses et de faire vivre des familles tout en donnant des "clefs de vie" via les livres aux lecteurs.